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CORRESPONDANCE

1380. À EDMOND DE GONCOURT.
Croisset, mercredi 25 [juin 1873].
Mon cher Ami,

Votre volume sur Gavarni[1] m’a tenu compagnie toute la journée de dimanche, — ou plutôt c’est vous deux qui étiez là. J’entendais parler votre pauvre frère et, pendant tout le temps de cette lecture, ç’a été à la fois un charme et une obsession. Mais qu’il en soit question comme si j’étais un lecteur indépendant.

Eh bien ! je crois cela un livre très bien fait et amusant. Reste à savoir en quoi consiste l’élément amusant. Pour moi, c’est ce qui m’amuse.

J’ai été séduit dès les premières pages par la couleur historique que vous avez su donner aux premières années de Gavarni. Quel drôle d’homme ! et quelle drôle de vie ! Quel monde loin de nous ! Après chaque paragraphe, on rêve.

Vous avez intercalé ses notes d’une manière fort habile. Ce qui est de lui se fond avec ce qui est de vous. Sous l’apparente bonhomie du récit, il y a une composition savante.

Mais pardon ! une idée incidente ! Comment se fait-il que vous n’ayez pas parlé de Camille Rogier qui, je crois, avait longtemps vécu avec Gavarni ? ou qui du moins le connaissait intimement ?

Il y a un fragment merveilleux. C’est celui qui

  1. Garvani, l’homme et l’œuvre (1 vol. Paris, Charpentier, 1873).