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CORRESPONDANCE

1401. À SA NIÈCE CAROLINE.
Croisset, mercredi, 4 heures [17 septembre 1873].

Tu as parfaitement deviné ma conduite. Lundi, j’ai été dîner chez Lapierre, où il n’y avait avec moi que M. le Préfet ; puis, le soir, est venu Houzeau, le professeur de chimie. Ce jour-là, la noce de M. Leroux a bien tiré cent coups de fusil ! et les salves ont recommencé le lendemain ! C’était, au dire d’Émile, « tout à fait très bien ». Huit fiacres ! et l’on avait tué six poules !

Moi, je continue toujours mon Candidat, dont je ne suis pas mécontent, quoique (j’en ai peur) il y aura bien des retouches à faire. Mais ça m’amuse énormément et, en somme, je mène une bonne vie, seul, dans mon domicile, sans personne qui m’embête, et poursuivant la même idée du matin jusqu’au soir, et même quelquefois pendant toute la nuit. Je me suis un peu calmé, toutefois, car la semaine dernière mon exaltation allait trop loin !

Que me manque-t-il ? Ma pauvre nièce ! pour lui faire part de mes élucubrations. Si Tourgueneff n’est pas à Croisset le 1er octobre, je décampe pour aller la voir, car il y a trop longtemps que je n’ai pas eu ce plaisir. Je t’avouerai que le Moscove commence à me dégoûter par sa mollasserie ! Je suis sûr qu’il a envie de venir, mais les Viardot l’entraînent ailleurs, et il n’ose pas affronter leur courroux… !

Dans les intervalles de l’art dramatique je me bourre d’un tas d’œuvres édifiantes, peu fortes à tous les points de vue. Mgr Dupanloup a cepen-