Page:Flaubert - Par les champs et par les grèves.djvu/65

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ception de ses harmonies et la conscience de ses développements.

Au pied de deux grands arbres dont les troncs s’entre-croisent, un jour verdâtre passe sur la mousse, et le dôme des feuilles vous rabat une claire lumière qui, largement, illuminant tous ces débris, en épaissit les ombres et en dévoile toutes les finesses.

On s’avance, on s’en va, errant le long des barbacanes, passant sous les arcades qui s’éventrent et d’où s’épand quelque longue plante frissonnante. Les voûtes comblées qui contiennent des morts résonnent sous vos pas ; les lézards courent sous les broussailles, les insectes grimpent contre les murs, le ciel brille et la ruine assoupie continue son sommeil.

Avec sa triple enceinte, ses donjons, ses cours intérieures, ses mâchicoulis, ses souterrains, ses remparts mis les uns sur les autres, comme écorce sur écorce et cuirasse sur cuirasse, le vieux château des Clisson se peut reconstruire en entier et réapparaître pour nous. Le souvenir des rudes existences d’autrefois en découle comme de lui-même, avec l’émanation des orties et la fraîcheur des lierres.

De longues traînées noires montent encore en diagonales le long des murs, comme au temps où flambaient les bûches dans les cheminées larges de dix-huit pieds. Des trous symétriques alignés dans la maçonnerie indiquent la place des étages où l’on arrivait jadis par ces escaliers