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livre iii.

Là, contant ses exploits, et puis les injustices,
Les dégoûts qu’il eut à souffrir,
Il demande pourquoi de si nombreux services
N’ont jamais pu rien obtenir.
Le bonhomme renard, avec sa voix cassée,
Lui dit : Mon cher enfant, la semaine passée,
Un blaireau, mon cousin, est mort dans ce terrier :
C’est moi qui suis son héritier,
J’ai conservé sa peau ; mets-la dessus la tienne
Et retourne à la cour. Le renard avec peine
Se soumit au conseil ; affublé de la peau
De feu son cousin le blaireau,
Il va se regarder dans l’eau d’une fontaine,
Se trouve l’air d’un sot, tel qu’était le cousin.
Tout honteux, de la cour il reprend le chemin.
Mais, quelques mois après, dans un riche équipage,
Entouré de valets, d’esclaves, de flatteurs,
Comblé de dons et de faveurs,
Il vient de sa fortune au vieillard faire hommage :
Il était grand-vizir. Je te l’avais bien dit,
S’écrie alors le vieux grand-père ;
Mon ami, chez les grands quiconque voudra plaire
Doit d’abord cacher son esprit.