Page:Forbin - Souvenirs de la Sicile.djvu/107

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
84
SOUVENIRS

villes de la Sicile. Je m’en plaignis à un habitant, qui me répondit en haussant les épaules : « Je ne suis ici que pour quelques instans ; j’aurais trop à faire pour y être mieux : le père de mon père y fut tout aussi mal. Au demeurant, il fait chaud : je vais chercher un lieu frais pour y dormir. Je vous engage à en faire autant, et à vous reposer de tout le reste, ainsi que je le pratique, sur la Sainte Vierge. » On rencontre donc encore des philosophes dans les petites rues montueuses de Girgenti. Les regards se détournent de ce village moderne, et se portent sur cette merveilleuse ligne de temples, sur cette seconde ligne de remparts, bien plus majestueuse, bien plus élégante, que l’architecture militaire de Vauban. Je suis enfin arrivé à la porte de l’ancienne ville : c’est ici le chemin de la citadelle ; il fut creusé par Dédale. Voici le fleuve Acragas ; il n’a plus d’autels, plus de statues d’ivoire, et garde, sous le nom de Drago, l’incognito de sa divinité passée. Ici est le mont Toro occupé par les Carthaginois, et ce camp où s’établirent si long-temps les Romains. Voilà le fleuve Hypsa, le mont Camico, la Rupe Athenea, le temple de Junon Lacinie, celui de la Concorde ; et enfin une plaine entière est cou-