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DE LA SICILE.

versant les ravins rougeâtres et les laves qui couvrent ce désert funèbre et désolé. Reprenant nos mulets, nous rentrâmes dans la regione nemorosa, qui nous semblait être l’Arcadie ; nous revîmes Nicolosi, et enfin Catane.

Mon esprit avait été frappé par les plus grands contrastes. En effet, quand mes yeux fatigués refusaient de se fixer plus long-temps sur le nuage qui s’exhalait des entrailles de la terre, ils se reposaient de cette effrayante recherche en se plongeant dans l’espace du ciel et des mers. D’une part, l’obscurité du cratère n’était dissipée que pour quelques secondes par des bouffées d’une fumée livide ; de l’autre, le soleil se levait dans toute sa pompe, et réfléchissait sur la mer de Calabre mille couleurs éclatantes. Je respirais un air glacial, tandis que la cendre brûlait mes pieds. Enfin l’odeur délétère de toutes les substances volcaniques les plus puissantes m’avertissait que je touchais aux confins de l’empire de l’homme, et que là commençait le domaine de la mort.

L’Etna, entouré de volcans, postes avancés de cet inexorable fléau, a vomi des fleuves de lave qui sont venus s’engloutir dans la mer,