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SOUVENIRS

Parmi les chants siciliens (37), plusieurs sont empreints d’un caractère guerrier qui atteste leur ancienneté. Les romances populaires de Sélinonte, de Sciacca, de Castro-Giovanni, rappellent les guerres féodales des Luni et des Perollo. Les Siciliens ont oublié les vers de Stésichore et de Théocrite, comme les Grecs ont perdu la lyre de Pindare et de Timothée. Il serait difficile de connaître les instrumens de musique dont on se servait en Sicile il y a quelques siècles : l’usage de la guitare y est assez récent, et les paysans de l’intérieur de l’île sont restés fidèles à la musette et à la flûte la plus simple.

Dans le nord de l’Europe, les chants nationaux sont mélancoliques ; tous semblent inspirés par un amour malheureux, par un triste souvenir, ou la crainte d’un avenir plus funeste : ainsi le premier chant de l’homme du nord fut une plainte. Les chansons populaires de la Sicile portent au contraire un caractère de gaieté qui rappelle sa prospérité passée, la richesse de ses villes, la fécondité de ses champs. La cause ne s’en trouverait-elle pas dans le plaisir que toute cette population éprouve à chanter sur le bord de la mer, la nuit, après une journée