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NOTES.

le charge de la mission honorable, mais toujours hasardeuse, de porter les lettres de Paléologue à Pierre et à Nicolas III : ce dernier le bénit, et promet d’ourdir une trame soudaine et cruelle contre les Français. Mieux reçu encore par le prince aragonais, Procida retourne à Constantinople, et ramène à Barcelone Accardo Latino, homme de confiance de l’empereur, chargé d’une grosse somme d’or et qui devait s’entendre avec Pierre d’Aragon sur le plan et les moyens d’exécution de la conspiration. Là fut arrêté le massacre général des Français en Sicile.

Procida retournait dans cette île lorsqu’il apprit la nouvelle de la mort du pape Nicolas III, qui était l’ame de cette grande entreprise. Procida, atterré, sentit néanmoins qu’il fallait brusquer ce terrible dénouement. La police, peu habile à cette époque, le laissa, dit-on, parcourir les villes de la Sicile, passant pour fou, et, selon quelques historiens, soufflant dans une sorte de tube qu’il appliquait à l’oreille de tout le monde. Il avait soin, ajoute-t-on, de ne dire aux Français qu’une bouffonnerie qui les faisait rire, tandis qu’il transmettait aux Siciliens, au nom de Pierre et du saint-siége, l’ordre de massacrer les Français le 30 mars 1282. Quoi qu’il en soit de ce détail, le massacre eut lieu ce jour-là sur tous les points de la Sicile. Huit mille Français en furent victimes : on ne respecta ni l’âge, ni le rang, ni le sexe ; l’enfant