Page:Fougeret de Monbron - Le Canapé couleur de feu.djvu/80

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Quoiqu’il soit difficile d’expliquer les transports de joie de l’un et de l’autre ; de celle-ci de se voir libre, et de celui-là de se voir sur le point de jouir des embrassements de cette aimable fille, il ne se passa cependant, ce soir-là, rien de contraire à l’honnêteté. Ils couchèrent dans des lits séparés, résolus de partir le lendemain de grand matin.

Tout était dans le silence alors que l’hôte, grand fripon de sa profession, alla au lit d’Angélique, s’assit auprès de son oreiller et lui tint à peu près ce discours :

« Je ne suis point étonné, madame de votre résolution. Je sais que la seule passion d’une mère vaine vous a mise aux fers ; toute la province louera l’action généreuse que vous faites aujourd’hui. Mais je suis surpris au dernier point de voir qu’il semble que vous vouliez vous livrer entre les bras d’un jésuite, d’un prêtre, de votre père spirituel, d’un homme enfin que le malheur accompagnera partout. Je ne vous blâme pas d’avoir travaillé à votre affranchissement, mais il n’y aura pas un homme, quelque libertin qu’il puisse être, qui n’improuve que vous vous abandonniez à la passion d’une personne qui porte un caractère dont il se montre