Page:Fourier - Sur l'esprit irréligieux des modernes et dernières analogies 1850.djvu/34

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

veau tous les barbares et sauvages, après avoir tenté de revenir sur cette absurdité, ou elle déroge en tout ou en partie à leur damnation ; elle rend le mystère de la Rédemption ou inutile ou funeste aux catholiques. On vient d’en lire la démonstration détaillée pour les divers cas. Si elle damne en plein les barbares et sauvages, elle soulève les catholiques par cette monstrueuse boucherie, et détruit son propre système en sapant la religion par le ridicule. Peut-on fonder un culte sur des bases si légères, et n’est-il pas évident que les inventeurs et continuateurs de ces infâmes dogmes de l’enfer, sont les véritables auteurs de tout le désordre religieux qui règne dans l’âge moderne. Je le répète, les philosophes ne sont que des coupables de second ordre ; on savait que la philosophie fait métier d’intrigue et de controverse, qu’elle ne manquait pas de recueillir dans la théologie comme dans le système administratif, tous les germes d’agitation qu’elle pouvait y trouver. Il fallait donc se garder de fournir des armes à ces perturbateurs et de compromettre la religion par des dogmes qui déconsidèrent Dieu et lui aliènent tous les cœurs sans aucune utilité en mécanique administrative, ainsi que je l’ai prouvé.

Eh ! quel est le dénouement de tant d’inepties religieuses ? Après que ces ballotages de sectes cabalistiques ont affadi les esprits au point d’exciter l’indifférence générale sur toutes controverses religieuses, arrive inopinément la secte des illibéraux ou effarouchés qui se croient religieux en reproduisant les chaudières de l’enfer plus bouillantes que jamais ! Autres temps, autres mœurs, les atrocités infernales ne sont plus de saison.

Il faut un nouveau joug au peuple. La plus naturelle, la plus aimable des religions civilisées, la mythologie, est tombée, non par vétusté, mais pour n’avoir pas su transiger à propos avec les fantaisies et convenances progressives de la Civilisation, société inquiète, changeante par tempérament, qui non-seulement a besoin de modifier ses cultes selon les temps et les lieux, mais qui, lors même qu’elle serait dans les voies du bien, se jetterait sciemment dans le mal pour satisfaire son impatience de nouveautés. C’est vraiment à présent que ses cultes auraient besoin de modifications ; mais pour opérer sur de pareilles matières, il faut connaître la théorie du mouvement passionnel, et quand on la connaît, on y voit que la Civilisation est arrivée à un tel degré de perversité, qu’elle ne doit plus songer à se corriger, mais à échapper à elle-même.

Rien de plus maladroit dans cette crise que de remettre en scène des ressorts caducs et suspects à tous égards, comme les chaudières de l’enfer. Ce sale moyen avait pour lui, en 1788, la fortune colossale de ses apôtres, la longue habitude des peuples. Aujourd’hui que ces