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MON ENCRIER

ici. Malgré les éloges de certains critiques distingués de qui M. Rostand est l’ami personnel, comme aussi bien malgré la réclame insensée faite autour de cette pièce depuis cinq ans, il me semble qu’il ne peut y avoir de discussion sérieuse entre ceux qui ont entendu Chantecler au théâtre : jamais on n’a plus complètement « raté » une œuvre. Et ce n’est pas peu dire…

⁂ N’allez pas croire au moins que, si je parle de la sorte, j’y éprouve bien du plaisir. Rostand fut la plus chère idole peut-être de ma jeunesse. Il fut un temps où je ne jurais que par la Princesse lointaine, et aujourd’hui encore Cyrano m’apparaît comme un grand chef-d’œuvre.

Mais enfin, puisque c’est de Chantecler qu’il s’agit, il faut bien avouer la vérité sur Chantecler.

Je dis : « raté ». Il n’y a pas d’autre mot. On ne peut pas dire que ce soit une œuvre médiocre. C’est une œuvre manquée. On ne peut pas dire que ce soit un enfant faible ou non-viable. Ce n’est pas un enfant, c’est un monstre.

La pièce ne donne pas d’autre impression. Ce n’est pas plat, et je ne sais même pas si j’oserais dire que c’est ridicule. C’est plutôt ahurissant.

Pourquoi ? Parce que, de voir à la scène, pendant quatre actes, tous ces oiseaux portant