Page:Fournier - Souvenirs poétiques de l’école romantique, 1880.djvu/489

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Va ! tes cornes d’airain sont de fleurs couronnées,
Et ta barrière est close au pied des Pyrénées.
Burgos a pris sa lance et son rouge étendard ;
Valence, son épieu ; Grenade a pris son dard.

Dans ton chemin sanglant, ton front au joug d’ivoire
Ne ramènera plus le soc de la victoire.
Tu ne sentiras plus dans ton âpre sillon
Que le fouet du bouvier et son froid aiguillon ;
Et l’épi qui croîtra dans ton champ de bruyère
S’appellera néant, et fera ta litière.

Ah ! que sert de fouiller la terre de ton pied ?
Va ! ton herbe est amère, et rude ton sentier.
Tortose à sa ceinture a pendu son épée,
Salamanque trois jours dans ton sang s’est trempée.
Et le toréador a dit dans ton enclos :
Le faut-il immoler, répondez. Hidalgos !

Et cent peuples, muets sur leurs gradins d’albàlre,
Spectateurs entassés dans leur amphithéâtre,
Au pied du mont Oural, des Alpes, du Carmel,
Se sont penchés au bord de leur cirque éternel ;
Et, regardant l’arène et Valence qui pleure.
Et le monstre debout, ont répondu : Qu’il meure !

Qu’il meure ! ont répété les Portes Caspiennes,
Qu’un géant invisible aux rives cimmériennes
Ébranle avec fracas sur leurs durs gonds d’airain.
Qu’il meure ! a dit l’Oural. Sur la hutte de crin
Où vers la mer d’Azof le Tartare demeure.
Le vent du désert passe et répète : Qu’il meure !