Page:Fournier - Souvenirs poétiques de l’école romantique, 1880.djvu/488

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San Iaigo ! Benissez les longues espingoles.
San Andrès ! aiguisez les lances espagnoles.
San Juan ! donnez-nous des fusils enchantés,
Des sabres flamboyants, toujours ensanglantés !
San Lucar ! labourez le champ de nos batailles !
San Pedro ! faites-nous de belles funérailles !

Et là-haut, sur le mont, le clairon portugais
A dit : Écoutez-moi, cieux, sous vos vastes dais !
Et là-bas, dans la plaine à la verte pelouse
Où gronde le Douro, la trompette andalouse
A dit : Écoutez-moi, Vierge au bras tout-puissant !
Vase de mon combat, remplissez-vous de sang.

Qu’ont dit les Hidalgos, aux lances indomptées,
Qu’ont dit les guérillas, aux balles enchantées.
Quand la voix du clairon a sonné dans leur cœur ?
Leurs lèvres n’ont rien dit. Sans changer de couleur,
Les Hidalgos ont pris les lances espagnoles ;
Les saintes guérillas, les longues espingoles.

Leur lèvre ne veut plus sourire en un festin.
Tant qu’il vous reste un fils qui n’est pas orphelin,
Bourgogne, Roussillon, Guyenne, Normandie.
Leur bouche ne veut plus goûter la sainte hostie,
Avant que l’ossuaire élevé dans Burgos
Ne réveille, en sa soif, l’ourse de Roncevaux.

Ah ! fier taureau de Corse ! au milieu de l’arène.
Tu cherches ton étable avec ton auge pleine.
Et tu ne vois partout que le toréador.
Qu’as-tu fait de ta source au pied du mont Thabor ?
Vers ton étang d’Arcole, où sont tes pâturages ?
Sous l’orme de Wagram où sont tes frais ombrages ?

Que cherches-tu de l’œil au bout de l’horizon,
Ton berger d’Austerlitz, assis sur le gazon ?