Page:Fréchette - Poésies choisies, I, 1908.djvu/58

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 54 —


De grands caps désolés s’avançant dans les flots ;
Des brisants sons-marins, effroi des matelots ;
Des gorges sans issue où le mystère habite ;
Partout l’austérité du désert sans limite,
La solitude vierge en sa sublimité !

Pourtant, vers le Couchant le cap orienté,
La flottille s’avance ; et sans cesse, à mesure
Que les lointains brumeux que la distance azure
Se dessinent plus clairs aux yeux des voyageurs,
Rétrécissant aussi ses immenses largeurs,
Le grand fleuve revêt un aspect moins sauvage ;
Son courant roule un flot plus calme ; le rivage
Si sévère là-bas devient moins tourmenté ;
Et, tout en conservant leur fière majesté,
Ces vastes régions que le colosse arrose,
Où la forêt sommeille, et dont le regard ose
Pour la première fois sonder les profondeurs,
Se drapent par degrés d’éclatantes splendeurs.