Page:Frédéric II de Prusse - Correspondance avec Voltaire, tome 2.djvu/6

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deux méthodes ont chacune leur force & leur faibleſſe. Vous les peſez dans la balance du ſage ; & malgré le terrible poids que les Leibnitz & les Wolf mettent dans cette balance, vous prenez encore ce mot de Montagne, que ſais-je ? pour votre deviſe.

Je vois plus que jamais, par le mémoire ſur le Czarovitz, que V. A. R. daigne m’envoyer, que l’hiſtoire a ſon pyrrhoniſme auſſi bien que la métaphyſique. J’ai eu ſoin, dans celle de Louis XIV, de ne pas percer plus qu’il ne faut dans l’intérieur du cabinet. Je regarde les grands événemens de ce règne comme de beaux phénomènes dont je rends compte, ſans remonter au premier principe. La cauſe première n’eſt guère faite pour le phyſicien, & les premiers reſſorts des intrigues ne ſont guère faits pour l’hiſtorien. Peindre les mœurs des hommes, faire l’hiſtoire de l’eſprit humain dans ce beau ſiècle, & ſur-tout l’hiſtoire des arts, voilà mon ſeul objet. Je ſuis bien ſûr de dire la vérité quand je parlerai de Deſcartes, de Corneille, du Pouſſin, de Girardon, de tant d’établiſſemens utiles aux hommes ; je ſerais ſûr de mentir ſi je voulais rendre compte des converſations de Louis XIV & de madame de Maintenon.

Si vous daignez m’encourager dans cette carrière, je m’y enfoncerai plus avant que jamais ; mais en attendant je donnerai le reſte de cette année à la phyſique, & ſur-tout à la phy-