Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/118

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de certains actes manqués, d’un cas de lapsus, Quelqu’un a dit : « Da sind Dinge zumVorschwein gekommen. » Là-dessus, nous lui demandons… non, heureusement ce n’est pas nous qui le lui demandons, mais d’autres personnes, tout à fait étrangères à la psychanalyse, lui demandent ce qu’il veut dire par cette phrase inintelligible. Il répond qu’il avait l’intention de dire : (Das ware Schweinereien (c’étaient des cochonneries) », mais que cette intention a été refoulée par une autre, plus modérée : « Da sind Dinge zum Vorschein gekommen (des choses se sont alors produites) » ; seulement, la première intention, refoulée, lui a fait remplacer dans sa phrase le motVorschein par le mot Vorschwein, dépourvu de sens, mais marquant néanmoins son appréciation péjorative « des choses qui se sont produites ». Je vous ai expliqué alors que cette analyse constitue le prototype de toute recherche psychanalytique, et vous comprenez maintenant pourquoi la psychanalyse suit la technique qui consiste, autant que possible, à faire résoudre ses énigmes par le sujet analysé lui-même. C’est ainsi qu’à son tour le rêveur doit nous dire lui-même ce que signifie son rêve.

Cependant dans le rêve les choses ne sont pas tout à fait aussi simples. Dans les actes manqués, nous avions d’abord affaire à un certain nombre de cas simples ; après ceux-ci, nous nous étions trouvés en présence d’autres où le sujet interrogé ne voulait rien dire et repoussait même avec indignation la réponse que nous lui suggérions. Dans les rêves, les cas de la première catégorie manquent totalement : le rêveur dit toujours qu’il ne sait rien. Il ne peut pas récuser notre interprétation, parce que nous n’en avons aucune à lui proposer. Devons-nous donc renoncer de nouveau à notre tentative ? Le rêveur ne sachant rien, n’ayant nous-mêmes aucun élément d’information et aucune tierce personne n’étant renseignée davantage, il ne nous reste aucun espoir d’apprendre quelque chose. Eh bien, renoncez, si vous le voulez, à la tentative. Mais si vous tenez à ne pas l’abandonner, suivez-moi. Je vous dis notamment qu’il est fort possible, qu’il est même vraisemblable que le rêveur sait, malgré tout, ce que son rêve signifie, mais que, ne sachant pas qu’il le sait, il croit l’ignorer.