Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/173

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d’impossible, et je m’étonnais de répéter le mot qui m’avait tant surpris dans la bouche d’Olivier : J’attendrai… Je me demandais : quoi ? Et à cela, je n’avais rien à répondre, sinon des suppositions abominables dont l’image de Madeleine me paraissait aussitôt profanée. Puis j’apercevais Paris, l’avenir, et dans des lointains en dehors de toute certitude, la main cachée du hasard qui pouvait simplifier de tant de manières ce terrible tissu de problèmes, et, comme l’épée du Grec, les trancher, sinon les résoudre. J’acceptais même une catastrophe, à la condition qu’elle fût une issue, et peut-être, avec quelques années de plus, j’aurais lâchement cherché le moyen de terminer tout de suite une vie qui pouvait nuire à tant d’autres.

Vers le milieu de la nuit, j’entendis à travers le toit, à travers la distance, à toute portée de son, un cri bref, aigu, qui, même au plus fort de ces convulsions, me fit battre le cœur comme un cri d’ami. J’ouvris la fenêtre et j’écoutai. C’étaient des courlis de mer qui remontaient avec la marée haute et se dirigeaient à plein vol vers la rivière. Le cri se répéta une ou deux fois, mais il fallut le surprendre au passage, puis on ne l’entendit plus. Tout était immobile et sommeillant. Un petit nombre d’étoiles très-brillantes vibraient dans