Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/262

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mauvaises. Il y a des journées de plein été poudreuses, nuageuses, avec des soleils blancs et des bises du nord, qui ressemblent à cette période violente, tantôt brûlante et tantôt glacée, où je crus un moment que ma passion pour Madeleine allait finir, et de la plus triste façon, par un dépit.

Il y avait plusieurs semaines que je ne l’avais vue. J’avais usé mes rancunes dans un travail acharné. J’attendais qu’elle me fît signe de reparaître. J’avais rencontré M. de Nièvres une fois ; il m’avait dit : « Que devenez-vous ? » ou bien : « On ne vous voit plus. » L’une ou l’autre de ces formules que j’oublie n’était pas une invitation bien pressante à revenir. Je tins bon pendant quelques jours encore ; mais un pareil éloignement devenait un état négatif qui pouvait durer indéfiniment sans rien décider. Enfin je pris le parti de brusquer les choses. Je courus chez Madeleine ; elle était seule. J’entrai rapidement, sans avoir d’idée bien arrêtée sur ce que j’allais dire ou faire, mais avec le projet formel de briser cette armure de glace et de chercher dessous si le cœur de mon ancienne amie vivait toujours.

Je la trouvai dans son boudoir, dont le seul grand luxe était des fleurs, près d’un petit guéridon, dans la tenue la plus simple, assise et bro-