Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/265

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parler sur un ton tout à fait naturel et très-doux.

« Vous êtes d’un caractère malheureux et difficile. On a de la peine à vous comprendre et plus de peine encore à vous assister. On voudrait vous encourager, vous soutenir, quelquefois vous plaindre ; on vous interroge, et vous vous renfermez.

— Que voulez-vous que je vous dise, sinon que celui en qui vous avez confiance n’émerveillera personne et trompera, j’en ai peur, l’espoir obligeant de ses amis ?

— Pourquoi tromperiez-vous l’espoir de ceux qui vous veulent une position digne de vous ? continua Madeleine en se rassurant tout à fait sur un terrain qui lui semblait beaucoup plus ferme.

— Oh ! pour une raison bien simple : c’est que je n’ai aucune ambition.

— Et ce beau feu de travail qui vous prend par accès ?

— Il dure un peu, flambe extraordinairement vite et fort, et puis s’éteint. Cela durera quelques années encore, après quoi, l’illusion ayant cessé, la jeunesse étant loin, je verrai nettement qu’il faut en finir avec ces duperies. Alors je mènerai la seule vie qui me convienne, une vie de dilettantisme agréable dans quelque coin retiré de la