Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/277

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ainsi dire enveloppée d’un vêtement d’innocence et de loyauté qui la rendait invulnérable aux ardeurs qui lui venaient de moi, comme aux soupçons qui pouvaient lui venir du monde.

Rien n’était plus délicieux, plus navrant et plus redoutable que cette complicité singulière où Madeleine usait à mon profit des forces qui ne me rendaient point la santé. Cela dura des mois, peut-être une année, car j’entre ici dans une époque tellement confuse et agitée, qu’il ne m’en est resté que le sentiment assez vague d’un grand trouble qui continuait, et qu’aucun accident notable ne mesurait plus.

Elle quitta Paris pour aller aux bains d’Allemagne.

« J’entends que vous ne me suiviez pas, dit-elle. Il y aurait là mille inconvénients pour vous et pour moi. »

C’était la première fois que je la voyais s’occuper du soin de sa propre sûreté. Huit jours après son départ, je recevais d’elle une lettre admirablement sage et bonne. Je ne lui répondis point d’après sa prière. « Je vous tiendrai compagnie de loin, m’écrivait-elle, autant que cela se pourra. » Et pendant tout le temps que dura son absence, à des intervalles réguliers, elle mit la même patience à