Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/278

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m’écrire ; c’est ainsi qu’elle me récompensait de mon obéissance à ne pas la suivre. Elle savait bien que l’ennui et la solitude étaient de mauvais conseillers ; elle ne voulait pas me laisser seul avec son souvenir, sans intervenir de temps en temps par un signe évident de sa présence.

Je savais le jour de son retour. Je courus chez elle. Je fus reçu par M. de Nièvres, que je ne rencontrais plus sans un vif déplaisir. J’étais peut-être parfaitement injuste à son égard, et j’aime à croire que rien n’était fondé dans les suppositions désobligeantes que j’avais faites ; mais je voyais le mari de Mme de Nièvres à travers des imaginations peu lucides ; et, à tort ou à raison, ces imaginations me le montraient réservé, défiant, presque hostile. Ils étaient arrivés vers le matin. Julie, mal portante et fatiguée, dormait. Mme de Nièvres ne pouvait me recevoir. Elle parut au moment où j’écoutais ces explications, et M. de Nièvres nous quitta aussitôt.

Une idée subite me vint, et comme un conseil de prudence, en serrant la main de cette femme vaillante à qui je faisais courir tant de risques :

« J’aurais l’intention de voyager pendant quelque temps, — lui dis-je, après de courts remercîments pour ses bontés. — Qu’en dites-vous ?