Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/372

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nuit ; l’eau courait encore dans les sentiers plongeants, et roulait les dernières feuilles de l’année.

Nous marchâmes longtemps ainsi, avant que j’eusse pu recueillir l’ombre d’une idée lucide parmi les déterminations urgentes qui m’avaient amené chez Augustin. Je me rappelai enfin que j’avais des adieux à lui faire. Il crut d’abord que c’était un parti désespéré, pris seulement depuis la veille, et qui ne tiendrait pas contre de sages réflexions ; puis, quand il vit que ma résolution datait de plus loin, qu’elle était le résultat d’examens sans réplique, et que tôt ou tard elle serait accomplie, il ne discuta ni l’opinion que j’avais de moi-même, ni le jugement que je portais sur mon temps ; il me dit seulement :

« Je pense et je raisonne à peu près comme vous. Je me sens peu de chose, et ne me crois pas non plus de beaucoup inférieur au plus grand nombre ; seulement je n’ai pas le droit que vous avez d’être conséquent jusqu’au bout. Vous désertez modestement ; moi je reste, non par forfanterie, mais par nécessité, et d’abord par devoir.

— Je suis bien las, lui dis-je, et de toutes les manières j’ai besoin de repos. »

Nous nous séparâmes à Paris en nous disant : Au revoir ! comme on fait d’ordinaire quand il en