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souvenirs d’une actrice.

comble, et les premiers balcons étaient occupés par un certain duc de Grammont et sa société. Il donnait le ton, et les artistes les plus célèbres allaient faire de la musique chez lui. Il avait dans son château, à la campagne, près Paris, un petit théâtre sur lequel on essayait souvent les opéras nouveaux, comme on lit un manuscrit en société avant de représenter la pièce. Le balcon qui faisait face au sien était rempli d’habitués ; ils parlaient si haut, que l’on entendait tout ce qu’ils disaient. Je ne descendis qu’au moment d’entrer en scène ; et comme j’avais une jolie toilette, une assez jolie tournure, dit-on, il se fit un mouvement dans la salle qui n’était pas trop à mon désavantage (les femmes ne s’y trompent guère). Toutes les lorgnettes étaient braquées, toutes les oreilles tendues, mais je ne cherchai en entrant qu’un seul individu : c’était mon bourru de Dubuisson. Il était en face de moi à l’orchestre, le front appuyé sur sa canne. L’entrée de Zerbine commençant par un morceau d’action, une querelle entre le valet et la soubrette, il n’y avait donc encore rien à juger ; mais le premier air,