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souvenirs d’une actrice.

quoique peu important, est cependant du chant. On applaudit (un peu), seulement un encouragement. Dubuisson ne bougeait pas, il attendait le cantabile. Je le chantai sans fioriture, avec expression. Je fus très applaudie, et je vis mon bourru me faire : « Hum ! pas mal. » Cela me donna du courage pour l’air de Bravoura, qui commence le second acte. Les ritournelles des anciens opéras sont interminables. Cela peut avoir son bon côté, en ce qu’elles donnent le temps de se rassurer.

Je vis que les physionomies n’étaient plus aussi hostiles dans les loges, et que le parterre était bien disposé : cette fois, je risquai tout. « Allons, me dis-je, il faut faire le saut périlleux, il en arrivera ce qu’il pourra. » J’obtins un succès complet. Moins on avait attendu de moi, plus on trouva bien ce que je fis. J’entendais bourdonner à mon oreille : une jolie voix, de la légèreté, de la méthode, c’est au mieux. Après l’acte, mon antagoniste, le duc de Grammont vint sur le théâtre, m’accabla d’éloges, et me prédit que je serais une chanteuse distinguée. Il m’engagea à lui faire l’honneur de venir à ses soi-