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CHAP. VIII. l'autorité DANS LA FAMILLE. 97

nous donner nne idée de cette puissance paternelle. Dans cette antiquité, le père n'est pas seulement l'homme fort qui pro- tège et qui a aussi le pouvoir de se faire obéir : il est le prêtre, il est l'héritier du foyer, le continuateur des aïeux, la tige des descendants, le dépositaire des rites mystérieux du culte et des formules secrètes de la prière. Toute la religion résid«  en lui.

Le nom même dont on l'app elle, paier, porte en soi de curieux enseignements. Le mot est le même en grec, en latin, en san- scrit : d'oîi l'on peut déjà conclure que ce mot date d'un temps où les ancêtres des Hellènes, des Italiens et des Hindous, vi- vaient encore ensemble dans l'Asie centrale. Quel en était le sens et quelle idée présentait-il alors à l'esprit des hommes? on peut le savoir, car il a gardé cette signification première dans les formules de la langue religieuse et dans celles de la langue juridique. Lorsque les anciens, en invoquant Jupiter, l'ap- pelaient pater hominum Deorumque, ils ne voulaient pas dire que Jupiter fût le père des dieux et des hommes; car ils ne l'ont jamais considéré comme tel, et ils ont cru, au contraire, que le genre humain existait avant lui. Le même titre de vater était donné à Neptune, à Apollon, à Bacchus, à Vulcain, à Pluton, que les hommes assurément ne considéraient pas comme leurs pères'-, ainsi le titre de mater s'appliquait à Mi- nerve, à Diane, à Vesta, qui étaient réputées trois déesses vierges. De même dans la langue juridique le titre de pater ou paterfamitias pouvait être donné à un homme qui n'avait pas d'enfants, qui n'était pas marié, qui n'était même pas en âge de contracter le mariage*. L'idée de paternité ne s'atta- chait donc pas à ce mot. La vieille langue en avait un autre; qui désignait proprement le père et (jui, aussi ancien que

1. Anlu-Gelle, V, 12 : Jupiter... Sic et Neplunuspater conjuncte dictus em e. Satumuspater et Marfpater. Lactance, Instit., IV, 3 : Jupiter a precantihu-, paler vocatur, et Satumus et Janus et Liber et cxteri. Platon était appolé Dis Paler(YnTTOa, de ling. lat., V, 66; Giccron, de nal. deor., II, 26). Le même mol est appliqué au dieu Tibre dans les prières; Tiberine Pater, te, Sancte, precor (Tite-Livp, II, Jo). Virgile appelle Vulcain Pater Lemniuê, la dieu de LemaoS*.

3. Ulpien, au Digeste, I, 6, 4 : Palretfamiliwrwn twni qy,% «i«rU <imr pol'^- Inlif . mnt pubère», »%ve ifnpuhmr»

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