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LIVRE I. ANTIQUES CROYANCES.

ces pensées des anciennes générations. Phryxos avait été contraint de quitter la Grèce et avait fui jusqu’en Colchide. Il était mort dans ce pays ; mais tout mort qu’il était, il voulait revenir en Grèce. Il apparut donc à Pélias et lui prescrivit d’aller en Colchide pour en rapporter son âme. Sans doute cette âme avait le regret du sol de la patrie, du tombeau de la famille ; mais attachée aux restes corporels, elle ne pouvait pas quitter sans eux la Colchide*.

De cette croyance primitive dériva la nécessité de la sépulture. Pour que l’âme fût fixée dans cette demeure souterraine qui lui convenait pour sa seconde vie, il fallait que le corps, auquel elle restait attachée, fût recouvert de terre. L’âme qui n’avait pas son tombeau n’avait pas de demeure. Elle était errante. En vain aspirait-elle au repos, qu’elle devait aimer après les agitations et le travail de cette vie ; il lui fallait errer toujours, sous forme de larve ou de fantôme, sans jamais s’arrêter, sans jamais recevoir les offrandes et les aliments dont elle avait besoin. Malheureuse, elle devenait bientôt malfaisante. Elle tourmentait les vivants, leur envoyait des maladies, ravageait leurs moissons, les effrayait par des apparitions lugubres, pour les avertir de donner la sépulture à son corps et à elle-même. De là est venue la croyance aux revenants*. Toute l’antiquité a été persuadée que sans la sépulture l’âme était misérable, et que par la sépulture elle devenait à jamais heureuse. Ce n’était pas pour l’étalage de la douleur qu’on accomplissait la cérémonie funèbre, c’était pour le repos et le bonheur du mort*.

Remarquons bien qu’il ne suffisait pas que le corps fût mis en terre. Il fallait encore observer des rites traditionnels et prononcer des formules déterminées. On trouve dans Plante l’histoire d’un revenant* ; c’est une âme qui est forcément

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  1. Pindare, Pythiq., IV. 384, édit. Heyne ; voir le Scholiaste.
  2. Cicéron, Tuscvilaneê, I, »6. Euripide, Troad., 1085. Hérodote, V, 92. Virgile VI, 371, 879. Horace, Odes, I, 23. Ovide, Fasl., V, 483 Pline, Epitt., VII, »7. Suétone, Calig., 59. Serrios, ad /En., III, 68.
  3. Iliade, XXII, S&8 ; Odynaée, XI, T>.
  4. Plaute, itfM(«ttart«, III, a.