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288 LIVRE IV. LES REVOLDTIO

qui lui fit opposition ne fut pas celle des clients, des pauvres, qui étaient répartis dans les bourgades et les ylvï). Ces hom- mes se réjouirent plutôt d'un changement qui donnait vm chef à leurs chefs et assurait à eux-mêmes un recours et une pro- tection. Ceux qui souffrirent du changement furent les chefs des familles, les chefs des bourgades et des tribus, les paoïXai;, les çuXoSaatXerç, ces eupatrides qui avaient par droit hérédi- taire l'autorité suprême dans leur y^vo? ou dans leur tribu. Ils défendirent de leur mieux leur indépendance; perdue, ils la regrettèrent.

Du moins retinrent-ils tout ce qu'ils purent de leur ancienne autorité. Chacun d'eux- resta le chef tout-puissant de sa tribu ou de son ylvoç. Thésée ne put pas détruire une autorité que la religion avait établie et qu'elle rendait inviolable. 11 y a plus. Si l'on examine les traditions qui sont relatives à cette époque, on entrevoit que ces puissants eupatrides ne consen-. tirent à s'associer pour former une cité qu'en stipulant que le gouvernement serait réellement fédératif et que chacun d'eux y aurait part. Il y eut bien un roi suprême; mais dès que les intérêts communs étaient en jeu, l'assemblée des chefs devait être convoquée et rien d'important ne pouvait être fait qu'avec l'assentiment de cette sorte de sénat.

Ces traditions, dans le langage des générations suivantes, s'exprimaient à peu près ainsi : Thésée a changé le gouverne- ment d'ALhènes et de monarchique il l'a rendu républicain. Aihsi parlent Aristote, Isocrate, Démosthène, Plutarque. Sous cette forme un peu mensongère, il y a- un fonds vrai. Thésée a bien, comme dit la* tradition, « remis l'autorité souveraina entre les mains du peuple ». Seulement, le mot peuple, ôôiioç, que la tradition a conservé, n'avait pas au temps de Thésée une application aussi étendue que celle qu'il a eue au temps de Démosthène. Ce peuple ou corps politique ne pouvait être alors que l'aristocratie, c'est-à-dire l'ensemble des chefs det Tfivïj « .

1. PlnUrqne, Thitée, 2S; Aristote, cité par Plutarque, ibidem; Isocrate, Hé- tène, 36 ; Démosthène, tn Neseram. 75. La légende de Thésée avait été sans nui doute eUén!e par U temps et surtout par l'esprit démocratique.

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