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SOÎ LIVRE IV. LES RÉVOLUTIONS.

tique, son autorité paternelle, le régime de la g^cns et enfi tout le droit privé que la religion primitive avait étalili.

Ce grand et général effort de l'arislocralie répondait donc à on danger. Or il paraît qu'en dépit de ses efforts et de sa vic- toire même, le danger subsista. Les vieilles institutions com- mençaient à chanceler et de grayes changements allaient l'introduire dans la constitution intime des familles.

Le vieux régime de la gens, fondé par la religion de la fa- mille, n'avait pas été détruit le jour où les hommes étaient passés au régime de la cité. On n'avait pas voulu ou on n'avait pas pu y renoncer immédiatement, les chefs tenant à conserver leur autorité, les inférieurs n'ayant pas tout de suite la pensée de s'affranchir. On avait donc concilié le régime de la gens avec celui de la cité. Mais c'étaient, au fond, deux régimes opposés, que l'on ne devait pas espérer d'allier pour toujours et qui devaient un jour ou l'autre se faire la guerre. La famille, in- divisible et nombreuse, était trop forte et trop indépendante pour que le pouvoir social n'éprouvât pas la tentation et même le besoin de l'affaiblir. Ou la cité ne devait pas durer, ou elle devait à la longue briser la famille.

L'ancienne gens avec son foyer unique, son chef souverain, son domaine -indivisible, se conçoit bien tant que dure l'état d'isolement et qu'il n'existe pas d'autre société qu'elle-, mais, dès que les hommes sont réunis en cité, le pouvoir de l'ancien chef est forcément amoindri; car, en même temps qu'il est souverain chez lui, il est membre d'une communauté ; comme tel, des intérêts généraux l'obligent à des sacrifices, et des lois générales lui commandent l'obéissance. A ses propres yeux et surtout aux yeux de ses inférieurs, sa dignité est diminuée. Puis, dans cette communauté, si aristocratiquement qu'elle soit constituée, les inférieurs comptent pourtant pour quelque chose ne serait-ce qu'à cause de leur nombre? La famille qui comprend plusieurs branches et qui se rend aux comices entourée d'une foule de clients a naturellement plus d'auto- rité dans les délibérations communes que la famille peu nom- breuse et qui compte peu de bras et peu de soldats. Or ces in- férieurs ne tardent guère ^ sentir l'importance qu'ils ont et

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