Page:Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1920.djvu/430

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

fondement nouveau sur lequel elle puisse appuyer les lois sociales et l’idée de patrie’.

L’école cynique va plus loin. Elle nie la patrie elle-même. Diogène se vantait de n’avoir droit de cité nulle part, et Cratès disait que sa patrie à lui c’était le mépris de l’opinion des autres. Les cyniques ajoutaient cette vérité alors bien nouvelle, que l’homme est citoyen de l’univers et que la patrie n’est pas l’étroite enceinte d’une ville. Ils considéraient le patriotisme municipal comme un préjugé, et supprimaient du nombre des sentiments l’amour de la cité.

Par dégoût ou par dédain, les philosophes s’éloignaient de plus en plus des affaires publiques. Socrate avait encore rempli les devoirs du citoyen;. Platon avait essayé de travailler pour l’État en le réformant. Aristote, déjà pliïs indifférent, se borna au rôle d’observateur et fit de l’État un objet d’études scientifiques. Les épicuriens laissèrent de côté les affaires publiques. « N’y mettez pas la main, disait Épicure, à moins que quelque puissance supérieure ne vous y contraigne. » Les cyniques ne voulaient même pas être citoyens.

Les stoïciens revinrent à la politique. Zenon, Cléanthe, Chrysippe écrivirent de nombreux traités sur le gouvernement des États. Mais leurs principes étaient fort éloignés de la vieille politique municipale. Voici en quels termes un ancien nous renseigne sur les doctrines que contenaient leurs écrits. « Zenon, dans son traité sur le gouvei’nement, s’est proposé de nous montrer que nous ne sommes pas les habitants de tel dème ou de telle ville, séparés les uns des autres par un diroit particulier et des lois exclusives, mais que nous devons voir ans tous les hommes des concitoyens, comme si nous appartenions tous au même dème et à la même cité *. » On voit par là quel chemin les idées avaient parcouru de Socrate à Zenon. Socrate se croyait encore tenu, d’adorer, autant qu’il pouvait, les dieux de l’État. Platon ne concevait pas encore d’autre gouvernement que celui d’une cité. Zénon passe par-dessus

l. Aristote, Politique, II, 5, 12; IV, 5; IV, 7, 3 ; VU, 4 (VI, «^

t. P*«udo-Plutarque, Fortune d’Alexarïdre, t.