Page:Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1920.djvu/463

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CHAP. II. LA CONQUÊTE ROMAINfc. ^•'^

ni la dat« de ce décret ni le mm du prince qui' l'a porlo- on «n fait honneur avec quelque vraisemblance à Caracalla, c'est- à-dire à un piince qui n'eut jamais de vues bien élevées; aussi ne le lui allribue-t-on que comme une simple mesure fisoilo. On ne rencontre guère dans l'histoire de décrets plus impor- tants que celui-là : il supprimait la distinction qui existait depuis la conquête romaine entre le peuple dominateur et les peuples sujets-, il faisait même disparaître la distinction beauc< -ip pluî vieille que la religion et le droit avaient mar- quée entre les cités. Cependant les historiens de ce temps-là n'en ont pas pris note, et nous ne le connaissons que par deux textes vagues des jurisconsultes et une courte indication de Dion Cassius'. Si ce décret n'a pas frappé les contemporains et n'a pas été remarqué de ceux qui écrivaient alors l'histoire, c'est que le changement dont il était l'expression légale était achevé depuis longtemps. L'inégalité entre les citoyens et les sujets s'était affaiblie à> chaque génération et s'était peu à peu effacée. Le décret put passer inaperçu, sous le voile d'une mesure fiscale; il proclamait et faisait passer dans le domaine du droit ce qui était déjà un fait accompli.

La titre de citoyen commença alors à tomber en désuétude, ou, s'il fut encore employé, ce fut pour désigner la condition d'homme libre opposée à celle d'esclave. A partir de ce temps- là, tout ce qui faisait partie de l'empire romain, d<?puis l'Es-

1. € Antoiiinus Pius jun romanw civiialis omnibus subjectis doTiainl.t Jii». tinien, Novelles, 78, ch. 5. « M orbe romano qui sunt, ex constitutione iinpe- ratoris Antonini, cives romani effecti xunt. » Ulpien, au Digeste, liv. l, lit. 5, 17. On sait d'ailleurs par Sparlien ,qu6 Caracalla se faisait appeler Anlonin dans le«  actes ofticiels. Itu.n Lassiu» dit (LXVll, 9) que Caracalla donna à tous les h.iUi- tants de l'empire 1« Jroit de cité rom?.i£.e pour (généraliser l'impôt du viaKtième sur les afïranchisseinenis el si:r les successions, que les peregrini ne payaient pas, — La distinction entre péréfjrins, Latins et citoyens n'a pas entièrement disparu; oi la trouve encore dans Ulpien et dans le Code; il parut, en elTet, naturel que le. esclaves aflranchis ne devinssent pas aussitôt citoyens romains, mais passassent par tous les anciens échelons qui séparaient la servitude du droit de cité. On voil aussi à certains indices que la distinction entre les terres italiques et les terres pro- vinciales subsista encore assez longtemps {Code, Vil, 25 ; VU, 31; X^SO ; Digest.j li». L, lit. 1). Ainsi la ville de Tyr en Pliénicie, encore après Caracalla, jouissait par priviiége du droit italique {Digeste, liv. V, lit. J5); le maint en de cette distinction s'explique par rinlérèt des empereurs, qui ne voulaient pnsst priver es tributs que le sol provincial payait au lise.

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