Le lendemain, pour continuer leur voyage, les enfants purent profiter de l’occasion d’un char-à-bancs. La route se fit d’abord le plus gaîment du monde. Le ciel était d’un bleu éblouissant ; toutefois, depuis la veille, un grand vent froid du nord-ouest s’était levé et soufflait à tout rompre. C’était ce vent de la vallée du Rhône que les gens du pays appellent mistral, d’un mot qui veut dire le maître, car c’est le plus puissant des vents, et il a une telle force qu’il a pu faire dérailler des trains de chemins de fer en marche.
Julien s’étonnait de voir, malgré cela, l’air si lumineux et la campagne si riante.
— Oh ! dit le conducteur de la voiture, si nous n’avions pas ce mistral, quel pays merveilleux ce serait que le Dauphiné et la Provence ! Mais ce vent froid et desséchant est un fléau. Malgré cela, la terre est si fertile que, partout où on peut arroser nos champs, les moissons se succèdent avec une fécondité surprenante.
— Comment ? dit André, on arrose les champs, chez vous !
— Je crois bien ! Partout où on peut faire couler l’eau, la culture triple de bénéfice dans le midi. Malheureusement l’eau est rare ; mais on nous promet que bientôt on fera le long du Rhône, depuis Lyon jusqu’à Marseille, un superbe canal au moyen duquel on pourra arroser tout notre pays et le transformer en un vrai jardin.