Toute la nuit il dormit peu. Le matin de bonne heure, avant même que Julien s’éveillât, il s’était levé pour réfléchir. Il se dirigea sans bruit vers le jardin du garde, voulant examiner le pays, qu’il n’avait vu que le soir à la brune.
Assis sur un banc au bord de la Sarre, qui coule le long du jardin entre deux haies de bouleaux et de saules, André se tourna vers le sud, et il regarda l’horizon borné par les prolongements de la chaîne des Vosges.
— C’est là, se dit-il, que se trouve la France[1], là que je dois la nuit prochaine emmener mon petit Julien, là qu’il faut que je découvre, sans aucun secours, un sentier assez peu fréquenté pour n’y rencontrer personne et passer librement la frontière. Mon Dieu, comment ferai-je ?
Et il continuait de regarder avec tristesse les montagnes qui le séparaient de la France, et qui se dressaient devant lui comme une muraille infranchissable.
- ↑ Voir page 308, la carte de France où est tracé l’itinéraire suivi par André et Julien.