Page:Gagneur - Trois soeurs rivales.djvu/16

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pour le dessin l’avait élevé peu à peu à la profession de peintre-décorateur.

Après avoir achevé son tour de France, il était rentré momentanément dans sa famille. Ce fut alors, six mois avant l’arrivée de Paul de Vaudrey au château de Domblans, que commença, à proprement parler, le petit drame que nous nous proposons de raconter.

Il est indispensable de donner quelques détails sur ces événements antérieurs, car ils exercèrent une funeste influence sur la destinée d’Henriette.

Selon une ancienne coutume de sa famille, M. de Charassin, qui se montrait volontiers, à l’égard des paysans, soit par diplomatie, soit par bonté réelle, affable et débonnaire, désirait que ses filles assistassent aux fêtes du village et ces jours-là ouvrissent la danse. Mlles de Charassin, privées de tout plaisir, prenaient ces fêtes fort au sérieux, et, mettant de côté toute morgue et tout orgueil de caste, s’y amusaient et dansaient de grand cœur.

Ce fut dans ces réunions villageoises qu’Henriette vit pour la première fois Joseph Duthiou, dont la beauté, la mise presque élégante et les manières polies attirèrent son attention. Joseph ne tarda pas à s’apercevoir que Mlle de Charassin lui accordait quelque préférence et bientôt s’enhardit à rendre œillade pour œillade.

Le séjour de Joseph à Domblans fut prolongé par des travaux de décoration qu’on le chargea d’exécuter dans l’église du village. Quelques têtes d’anges assez bien peintes excitèrent l’admiration d’Henriette, qui crut découvrir dans ce jeune homme de remarquables facultés artistiques.

Jusque-là, dans l’oisiveté de cette vie de château uniforme et décolorée, l’imagination d’Henriette avait erré sans but, tour-