Page:Gagneur - Trois soeurs rivales.djvu/4

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

moindres discours une profonde admiration pour le grand roi qui daigna visiter la demeure seigneuriale des Charassin-Vautravers. Il se découvre avec respect devant une inscription latine placée sur la porte de la chambre rouge et ainsi conçue : In castello somblanco Henrious Magnus pernoc tavit rex.

M. de Charassin, capitaine des gardes du roi sous Charles X, a donné sa démission en 1830, et s’est retiré avec ses trois filles à Domblains, où il mène l’existence végétative d’un seigneur de campagne à vingt mille livres de rentes.

Comme son château, le vieux soldat, véritable anachronisme vivant, appartient à un autre siècle ; il méconnaît son époque, et place son espoir dans le retour du passé.

Pour M. de Charassin, Henri IV est toujours le modèle des souverains. Le baron rappelle sans cesse la fameuse poule au pot, sur les ailes de laquelle la mémoire du Béarnais a pénétré, dit-il, dans la moindre chaumière… Souhait généreux qui n’est peut-être qu’un bon mot ou un mensonge de roi.

Une admiration aussi exclusive a nécessairement quelque côté ridicule ; M. de Charassin s’efforce de copier les manières de Henri IV, et prétend même lui ressembler de visage. Grâce à son nez bourbonien, à sa barbe grisonnante taillée en éventail, il peut assez raisonnablement se faire cette illusion ; mais, pour un observateur, ses petits yeux bleus, mobiles et irréfléchis, n’ont ni la pénétration ni la finesse que devait exprimer l’œil gris du rusé Bourbon ; son front n’a point l’ampleur de l’intelli-