Page:Gagneur - Trois soeurs rivales.djvu/52

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

avec une remarquable présence d’esprit, le moyen de faire tourner à sa plus grande gloire cette désagréable découverte, il répondit à Renée, qui commençait à bien augurer de son étonnement et de son silence :

— Eh bien ! donc, puisque vous saviez ce que j’hésitais à vous apprendre, vous me disculperez aisément aux yeux de Gabrielle. L’indigne amour d’Henriette pour cet homme m’était connu, votre père me l’avait révélé et si j’épouse Henriette, c’est pour l’arracher aux dangers de cette liaison honteuse, c’est pour sauver l’honneur de votre famille ; car M. de Charassin a rendu de grands services à mon père, et je crois acquitter ainsi une dette de reconnaissance.

La générosité allait toujours droit à l’âme de la candide Renée ; aussi, ne soupçonnant pas l’hypocrisie de M. de Vaudrey, dit-elle à demi voix en lui serrant fortement la main :

— Paul, pardonnez-moi d’avoir pu vous mal juger ; vous avez un grand et noble cœur.

Lorsqu’ils sortirent de l’endroit où ils s’étaient tenus à l’écart, plusieurs oiseaux endormis dans la charmille s’éveillèrent et s’envolèrent avec fracas. Ce bruit attira l’attention d’Henriette et de son amant ; ils purent distinguer les deux ombres de Renée et de Paul qui s’éloignaient.

Après un entretien fort orageux, la fiancée de M. de Vaudrey n’avait qu’à grand’peine réussi à calmer les colères jalouses de son amant.

— Je me suis jetée aux genoux de mon père, lui avait-elle dit, pour implorer son consentement à notre union ; mais mes larmes et mes supplications n’ont pu l’attendrir. Maintenant, on me surveille, et je ne puis plus te voir ; je n’ose même plus sortir la nuit pour venir chercher tes lettres, et tu