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Page:Gagnon - Chansons populaires du Canada, 1880.djvu/353

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DU CANADA

formes, très-propres à peindre l’état d’illumination céleste, appartiennent spécialement à la langue des Hébreux.[1]

« Ainsi donc, permanence, expression illimitée, infinie, symbolique, aspiration vers Dieu, accent spirituel, enthousiasme, parole triomphante, etc., etc., tel est le caractère dominant, le ton, le mode particulier de la poésie et du langage de la Bible.

« Maintenant, comparez à cette langue certaine langue du Nord, par exemple, dans laquelle le caractère opposé se sera développé aux dépens de celui que nous avons essayé d’analyser ; langue presque impuissante à exprimer par le verbe la plénitude de l’être, de la vie et de l’action, mais très-propre, par la multiplicité des temps, par l’abondance des substantifs, par la richesse des synonymes, à représenter toutes les modifications de l’espace et de la durée ; langue qui se prête bien plus à la lutte des sentiments, aux conflits des passions qui sont du domaine du drame, qu’aux sublimes élévations, aux élans divins de l’ode ; chez laquelle l’aspiration, l’élément spirituel seront remplacés par une structure tout artificielle, par l’accent terrestre et sensuel, et par cette foule d’images voluptueuses qui peignent avec les couleurs les plus vives, les nuances les plus délicates, tous les accidents et toutes les vicissitudes de la vie positive, au cercle de laquelle elle semble exclusivement bornée ; comparez, disons-nous, à la langue hébraïque une langue d’un semblable caractère, et vous comprendrez aisément que le peuple qui a parlé la première a dû retenir, dans un ensemble à peu près complet, les traditions touchant l’ordre de la révélation,

  1. V. l’Histoire de la littérature de F Schlegel, t. 1., pp. 180-221.