Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 1.djvu/431

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fleur de mon âme ? dit Oluf très surpris à la jeune châtelaine.

— Du chevalier à l’étoile rouge que vous menez toujours avec vous ; celui qui est né d’un regard du chanteur bohémien, l’esprit funeste qui vous possède. Défaites-vous du chevalier à l’étoile rouge, ou je n’écouterai jamais vos propos d’amour ; je ne puis être la femme de deux hommes à la fois. »

Oluf eut beau faire et beau dire, il ne put seulement parvenir à baiser le petit doigt rose de la main de Brenda ; il s’en alla fort mécontent et résolu à combattre le chevalier à l’étoile rouge s’il pouvait le rencontrer.

Malgré l’accueil sévère de Brenda, Oluf reprit le lendemain la route du château à tourelles en forme de poivrière : les amoureux ne se rebutent pas aisément. Tout en cheminant il se disait : « Brenda sans doute est folle ; et que veut-elle dire avec son chevalier à l’étoile rouge ? »

La tempête était des plus violentes ; la neige tourbillonnait et permettait à peine de distinguer la terre du ciel. Une spirale de corbeaux, malgré les abois de Fenris et de Murg, qui sautaient en l’air pour les saisir, tournoyait sinistrement au-dessus du panache d’Oluf. À leur tête était le corbeau luisant comme le jais qui battait la mesure sur l’épaule du chanteur bohémien.

Fenris et Murg s’arrêtent subitement ; leurs