Page:Gautier - Chanson de Roland onzieme edition 1881.djvu/207

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CXXXVI

Par tout le champ de bataille va et vient Turpin l’archevêque ;
Jamais tel prêtré ne chanta messe
Et ne fît de telles prouesses de son corps ;
1565« Que Dieu te maudisse ! " crie-t-il au païen :
« Celui que mon cœur regrette, c’est toi qui l’as tué. »
Alors Turpin donne l’élan à son bon cheval,
Et frappe Malquidant sur l’écu de Tolède :
Sur l’herbe verte il l’abat raide mort.
" II frappe bien, notre archevêque, " disent les Français.Aoi.

CXXXVII

1570D’autre part est Grandoigne, un païen,
Fils de Capuel, roi de Cappadoce.
Il a donné à son cheval le nom de Marmoire :
L’oiseau qui vole est moins rapide.
Grandoigne lui lâche les rênes, l’éperonne
1575Et va de toute.sa force heurter Gerin :
Il met en pièces l’écu du Français et lui porte un formidable coup :
Du même coup son haubert est déchiré,
Et le gonfanon bleu du païen lui entre dans le corps ;
Il tombe mort sur le haut d’un pocher.
1575Grandoigne ensuite tue Gerier, le compagnon de Gerin ;
Il tue Bérengier, il tue Guyon de Saint-Antoine ;
Puis il va frapper Austoire, un riche duc
Qui tient sur le Rhône la seigneurie de Valence.
Il l’abat mort, et les païens d’entrer en grande joie,
1580Et les Français de s’écrier : " Comme les nôtres tombent ! »Aoi.

CXXXVIII

Le comte Roland tient au poing son épée rouge de sang.
Partout il la lève, et partout il la montre.
Mais il a entendu les sanglots des Français :
Si grande est sa douleur que son cœur est prêt à se fendre.