Page:Gautier - Chanson de Roland onzieme edition 1881.djvu/386

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La noit la guaitent entresqu’à l’ajurnée.
Lunc un alter belement l’enterrerent.
Mult grant honur i ad li Reis dunée.Aoi.

CGC

Li Emperere est repairiez ad Ais,
3735 Guenes li fel, en caeines de fer,
En la citet est devant le palais ;
À une estache l’unt atachiet cil serf,
Les mains li lient à curreies de cerf,

8733. Mult grant honur, etc. Nous n’ayons pas besoin de signaler ici la statue de la belle Aude dans le fameux monument de Saint-Faron. Nous renvoyons nos lecteurs à la dissertation et à la gravure que les Bénédictins nous donnent dans leurs Acta Sanctorum ordinis sancti Benedicti (ive siècle, première partie, pp. 665-667). Aude est représentée avec Turpin, Roland et Olivier, et ces deux vers sont mis sur les lèvres de ce dernier : Audoe conjugium tibi do, Rotlande, sororis, -Perpetuumque met, socialis foedus amoris. Le monument de Saint-Faron est du XIe-XIIe siècle. — -

8734. li Emperere est repairiez, Le procès de Ganelon est raconté en quelques lignes seulement par la Karlamagnus Saga (ch. xli. Voir la traduction dans notre première édition, Il p. 251) et par la Keiser Karl Magnusus kronike. (Ibid., p. 263.) D’après ce dernier texte, « le jugement fut que le comte Ganelon devait être traîne par toute la France. Ce qui fut fait. En sorte que pas un os ne resta à côté de l’autre dans tout son corps. " „

3736. En la citet, etc. Ici commence dans notre poème le jugement’de Ganelon, et nous avons démontré ailleurs que, dans cette procédure, tout est d’origine germaine, tout est emprunté aux lois barbares et aux éléments germaniques de la législation féodale. (Voir notre première édition, II, p. 235 et suiv.) = Ganelon, tout d’abord, est soumis à l’emprisonnement préventif, puis à la torture. Et cette torture consiste en coups de bâton :« Les serfs l’attachent à un poteau, lui lient les mains avec des courroies de cuir de cerf, et le battent à coups de bâton. » (V. 3737 et suiv.) Or ce même supplice se retrouve, comme pénalité, dans les lois de toutes les tribus barbares. Voir la loi des Bavarois (VIII, ch. VI), des Burgun des (30, et 33, 2 ; 4, 4 ; 5, 6, 38, 63), des Francs Saliens (Constitution de Childebert), des Lombards (Liutprand, 6, 26, c ; 6, 88 ; 6, 50), des Frisons (3,7), des Wisigoths, etc. Les chiffres qui précèdent sont, comme les suivants, empruntés au Recueil de Davoud-Oglou (Histoire de la législation des anciens Germains). = Après l’emprisonnement préventif et la torture, s’ouvre le plait (v. 3742 et suiv.). Le tribunal dont il est question dans notre poèmén’est autre que l’ancien Placitum palatii, lequel, sous la première race, était, en effet, présidé par le roi, assisté de leudes et d’évêques. Il est vrai qu’on ne voit pas intervenir ces derniers dans notre Chanson ; mais toutes les parties du grand Empire y sont représentées par leurs barons. Dans notre Chanson comme dans la législation barbare, l’Empereur n’a que le droit de présider le tribun al ou de le faire présider en sa place, et il n’a même pas voix délibérative : « Seigneurs, leur dit Charles, jugezmoi le droit de Ganelon.» (y." 3751.)