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c’est notre Texte critique. Il y a dix ans que nous y travaillons sans relâche.

Nous avions à établir premièrement les leçons et, en second lieu, la langue exacte de la Chanson de Roland. Deux tâches qui sont absolument indépendantes l’une de l’autre.

Quant au choix des leçons, nous avons résolument adopté la méthode critique, laquelle consiste, dès que nous possédons trois familles de manuscrits, à faire entrer dans notre texte la leçon qui nous est fournie par deux d’entre elles contre la troisième. Or, à nos yeux et sans parler des familles nordique (Karlamagnus Saga), allemande (Ruolandes Liet) et néerlandaise, il y a trois familles ou, pour tenir un langage plus exact, trois groupes de manuscrits qui sont représentés par le texte d’Oxford, par celui de Venise (fr. IV) et par le Roman de Roncevaux[1].

Et c’est avec ces trois familles qu’il nous faut principalement composer notre texte critique.

Nous n’avions pas, dans nos premières éditions, adopté un système aussi rigoureux, aussi précis. Mais nous n’avons pas hésité, pour améliorer notre œuvre, à nous remettre à l’œuvre. Sur notre table de travail, nous avons placé ces trois éléments nécessaires de notre nouveau labeur : l’édition paléographique du texte de Venise IV, qui a été récemment donnée par M. Koelbing ; l’édition paléographique du manuscrit d’Oxford, qui vient d’être publiée par M. Stengel et qu’il a pris soin d’accompagner d’un fac-simile complet, et enfin le texte des remaniements de Paris, Versailles, Cambridge et Lyon.

Et généralement nous avons adopté la leçon qui. nous est fournie par Oxford et Venise contre Roncevaux ; par Oxford et Roncevaux contre Venise IV ; par Venise IV et Roncevaux contre Oxford.

Même il nous a fallu nous montrer plus hardi et faire subir parfois à notre texte quelques corrections et additions, d’après une seule famille de manuscrits, lorsque les autres familles nous faisaient défaut, et quand, d’ailleurs, la nécessité de ces rectifications paraissait nettement démontrée. Ce sont là des

  1. C’est sous ce dernier nom, comme on l’a dit plus haut, que l’on désigne aujourd’hui les Remaniements du Roland.