Page:Gautier - Fleurs d’orient.djvu/346

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Mais, le soir, sans mot dire, les eunuques dénouèrent et palpèrent l’épaisse chevelure, en firent tomber le poignard.

L’empereur, évidemment, savait tout. Bien souvent, tenant Ominah dans ses bras, penché sur elle, il la regardait avec une persistance étrange, comme s’il voulait lire jusqu’au fond de cette âme troublée. Il semblait aussi la contempler comme pour prendre congé d’elle, comme pour graver à jamais dans sa mémoire l’image de cette beauté dont il ne se rassasiait pas. Quelquefois pourtant la jeune femme, qui avait peine à soutenir l’intensité de ce regard, y voyait luire un éclat dur, terrible même : l’implacable vouloir de l’homme tout-puissant, accoutumé à tout dompter ou à tout briser. Palpitante, elle abaissait ses lourdes paupières, et, quand elle les relevait, de nouveau l’invincible tendresse noyait les yeux de l’amant.