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L’ORIENT.

Antoine, mais elle ne serait pas de mise pour les jongleurs que nous avons vus samedi. On dirait la réalisation vivante de ces gravures sur bois japonaises coloriées qui arrêtent le flâneur le long du quai Voltaire et surprennent l’artiste par la franchise du dessin, la vérité du mouvement et l’harmonie des teintes. Ces planches ouvrent tout un monde nouveau à la rêverie, les personnages qui les animent paraissent appartenir à une autre planète.

Quand nous entrâmes dans ce théâtre fantastiquement énorme, dont le plan semble avoir été donné par Piranèse, un Japonais, accroupi comme une idole sur une estrade dressée au milieu de la piste des chevaux, saluait la foule avec des prosternations de corps et des hochements de tête. Cela fait, il se mit à ranger devant lui, sur une petite table, des feuilles de papier blanc où nulle image n’apparaissait. Comme cette préparation, dont nous ne comprenions pas le but, était assez longue, nous eûmes le temps d’examiner l’opérateur. Il avait le sommet de la tête rasé,