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ÉGYPTE.

sous le bord de leur froc on entrevoyait des pantalons modernes et de gros souliers ferrés. Une lumière vive et gaie éclairait ce cortège lugubre, qui traversait, comme avec une hâte de fuir la vie, les groupes de la foule affairée saluant d’un air distrait la noire voiture. Un de ces pénitents nous effleura de son suaire et nous jeta un coup d’œil étrange, et qui nous fit courir un petit frisson dans le dos.

Décidément, les présages n’étaient pas favorables, nous eussions fait sagement de retourner à la maison ; mais comme César, à qui l’on criait de prendre garde aux ides de mars, nous ne tînmes pas compte de l’avertissement. Une fausse honte nous retint, et la crainte des railleries que les philistins du bon sens ne manqueraient pas de nous adresser sur notre brusque retour à Paris, nous fit passer outre ; mais nous avions la conviction intime d’un malheur, et la voix secrète qu’on devrait toujours écouter nous disait : « Ne t’embarque pas ! »

Le Mœris, superbe paquebot, dont le nom