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ÉGYPTE.

D’où vient qu’à l’aspect du serpent le frisson prend souvent aux plus braves, et que tel qui affronterait un lion, fuirait peut-être au sifflement d’une vipère ? Le vert, le bleu et le jaune métallique, qui vernissent ce corps tortueux et flexible rappellent, comme pour inspirer la méfiance, les couleurs des poisons. La force du serpent, cet animal fragile dont le plus léger coup de baguette briserait l’épine dorsale, réside en effet dans le poison, l’arme du traître et du lâche qui, lui aussi, se glisse en rampant dans l’ombre vers sa victime. Ce n’est qu’une piqûre d’épingle : à peine une goutte de sang, une tache bleuâtre à la peau, et vous êtes mort. L’antique malédiction pèse toujours sur le serpent, dont la femme doit écraser la tête, d’après la promesse de l’Écriture. Tous les animaux ressentent cette horreur. Comme nous l’avons dit, les singes, dès le commencement de la séance, étaient entrés dans une singulière agitation à laquelle avait succédé un abattement bien contraire à la pétulance habituelle de ces animaux. Ils nous rappelaient la prostra-