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ÉGYPTE ANCIENNE.

ges de l’existence familière de tous les peuples de l’antiquité. Ce que la mémoire des hommes a oublié, ce que les bibliothèques dispersées ont laissé perdre, le sépulcre l’a gardé fidèlement. — Lui seul, ouvrant sa bouche sombre, répond aux questions qu’on lui fait. Il sait ce qu’ignorent les historiens ; il est impartial et n’a aucun intérêt à mentir, à part l’innocente imposture de l’épitaphe.

Chaque génération, en descendant pour toujours sous la terre, après s’être agitée quelques minutes à la surface, écrit, sur le mur de sa demeure funèbre, le mot vrai de la civilisation contemporaine. Elle emporte avec elle ses dieux, ses croyances, ses usages, ses arts, son luxe, ses originalités, tout ce qu’on vit et qu’on ne verra plus ; la main des hommes roule des rochers, le vent du désert pousse du sable, l’eau du fleuve dépose du limon sur l’entrée perdue de la nécropole. Les puits se comblent, les couloirs souterrains s’oblitèrent, les tombes s’enfoncent et disparaissent sous la poussière des empires ; mille, deux mille, trois mille,