Page:Gautier - L’Orient, tome 2, Charpentier-Fasquelle, 1893.djvu/294

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
284
L’ORIENT.

ques, est une surprise désappointée. Ils sont tentés de s’écrier : « Peut-on être Carthaginois ! »

On le peut, l’auteur de Salammbô le prouve, mais ce n’est pas aisé. À la longue, le delenda Carthago du vieux Caton s’est accompli littéralement. Après bien des renaissances et des rechutes, Carthage a disparu, ne laissant pour ruines visibles que quelques arches d’aqueduc. Sa langue s’est perdue ; il n’en reste qu’un monologue et quelques mots dans le Pœnulus de Plaute, parodiés sans doute comme ces jargons hybrides par lesquels on imite dérisoirement au théâtre les idiomes étrangers. Les légendes des rares médailles puniques sont indéchiffrables ou d’une interprétation arbitraire. À défaut de monuments, M. Gustave Flaubert, avec une patience de bénédictin, a dépouillé toute l’histoire antique. Chaque passage se rapportant, de près ou de loin, à son sujet, a été relevé ; pour un détail, il a lu de gros volumes qui ne contenaient que ce détail. Non content de cela, il a fait une excursion inves-