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TUNIS.

bla que du fond d’un rêve l’Orient venait à notre rencontre.

Dès les premiers mots on sent la vérité du dessin et de la couleur. M. Léon Michel n’est pas un de ces voyageurs vagues qui traversent des sites enchanteurs, contemplent des palais magnifiques, s’assoient sous des colonnades orgueilleuses et se désaltèrent à des ruisseaux agréables. — Il suffit, pour juger de sa manière qui transporte dans le style les procédés de Decamps, de Marilhat et d’Eugène Delacroix, de lire le passage sur le marché de Philippeville. Le trait est net ; la couleur éclatante et chaude, et le premier éblouissement de la lumière africaine y est rendu avec cette ardeur naïve qui est comme la jeunesse du voyage. Les Arabes sous la nonchalance majestueuse du burnous, les Maltais aux cheveux frisés et aux longs bonnets de laine, les nègres badigeonneurs, drapés et constellés de blanc, les Moresques voilées par le yachmack et le feredgé, ce domino de la rue qui garde mieux son secret que le domino de l’Opéra, le ca-