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L’ORIENT.

autour des joncs du marais. Je passai une heure entière, couché près de la source, à regarder ce pays pâle, ce soleil pâle, à écouter ce vent si doux et si triste. La nuit qui tombait n’augmenta ni la solitude, ni l’abandon, ni l’inexprimable désolation de ce lieu. »

Vous voyez que notre peintre a sur sa palette de quoi rendre tous les effets. — Il peut se passer de cobalt et de mine de Saturne. Mais c’est un voyage au pays du bleu que nous vous avons promis ; hâtons le pas ; le ciel s’éclaircit de plus en plus ; le sol, tantôt sablonneux, tantôt coupé de marécages, se recouvre parfois de touffes d’alfa, d’absinthes, de pourpiers de mer, de romarins, et, de loin en loin, d’arbustes épineux et de pistachiers sauvages.

« Chaque fois que le convoi passe auprès d’un de ces beaux arbres au feuillage sombre et lustré, il se rassemble autour du tronc ; ceux des chameliers qui sont montés se dressent à genoux pour atteindre à la hauteur des branches, arrachent des poignées de fruits et les jettent à leurs compagnons qui vont à