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Page:Gautier - L’art moderne, Lévy, 1856.djvu/17

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génératives de la nature, les principes actif et passif, les deux portions séparées de l’androgyne primordial, et les signes mystérieux, hiéroglyphes de la création que l’Inde adorait dans les temples d’Ixora, et que la Grèce promenait aux fêtes Eleusines dans le van recouvert d’un voile…

L’imposte qui ferme en quelque sorte comme un camée de bracelet la longue suite des compositions parties de cet endroit de l’édifice, pour en faire le tour, renferme un sujet dont il vaut mieux ne parler que lorsque nous serons revenus à notre point de départ, car il est le résumé de la pensée générale.

Le premier tableau que nous trouvons à notre gauche en entrant, – qu’on nous permette cette anticipation pour une œuvre qui n’existe encore qu’à l’état de cartons et de croquis, – représente le déluge, non pas pris comme ceux du Poussin ou de Girodet, dans le sens épisodique d’une douzaine d’hommes qui se noient d’une façon plus ou moins théâtrale, mais entendu comme le cataclysme destructeur du monde primitif et des races antédiluviennes. Au fond s’étagent les terrasses et les tours d’Enochia, la ville des géants, dont le flot envahisseur lèche déjà les escaliers de granit ; sur le devant fourmillent, dans une confusion pleine d’épouvante, les créations colossales et monstrueuses dont le poids fatiguait la terre ; informes ébauches de la matière qui devaient disparaître sans retour. Les générations étranges produites par le commerce d’Adam avec la Dive Lilith et les créatures qui peuplaient l’Eden avant la formation d’Eve, les enfants des anges et des filles de la terre, les résultats hideux des incestes et des mélanges bizarres entre les géants et les esprits des planètes voisines qui alors se pouvaient visiter, tout ce monde démesuré et