Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/117

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— Devant le palais, aux pieds de la statue du roi de France. — Cela m’a soulagé vraiment de chercher une querelle injuste à ce sujet du Grand Mogol, conclut-il, en continuant son chemin.

Et il gagna les jardins sans s’apercevoir que l’inconnu le suivait de loin.

La fête était de plus en plus joyeuse, des couples dansaient maintenant sur la grande pelouse, avec plus de laisser aller, d’animation. On soupait, dans la vaisselle plate et de vermeil, à de petites tables dressées de toutes parts ; les jeunes échansons, vêtus à l’orientale, versaient, sans repos, le champagne ; et les têtes s’échauffaient ; la gaieté, de plus en plus bruyante, débordait.

Bussy s’enfonça sous les frondaisons, cherchant les allées désertes ; mais d’autres que lui les cherchaient aussi : des amoureux, sans doute, qui s’y promenaient lentement, se chuchotant de douces paroles.

Il revint sur ses pas.

En débouchant dans un carrefour très éclairé, il vit la foule massée en cercle et extrêmement attentive à quelque chose qu’il ne lui était pas possible d’apercevoir. Il s’informa de ce que c’était.

— Une espèce de squelette qui dit la bonne aventure, lui répondit-on.

Tiens ! s’il pouvait savoir quelque chose de sa destinée ? Il ne croyait guère à ces sorcelleries ; cependant on pouvait toujours voir, puisque c’était un jeu.

Il manœuvra adroitement et parvint au premier rang des spectateurs. Il vit alors un fakir d’une maigreur vraiment fantastique, dont la peau noire cou-